Marcel est allé voir la semaine dernière le spectacle Iphis et Iante au Théâtre du Gymnase à Marseille.
Une « invitation à la découverte d’un texte oublié et inclassable du XVIIe siècle, comédie romanesque et drame fantastique d’une grande modernité puisqu’il invite à réfléchir sur la complexité de l’identité, du genre et des désirs ».
Le « pitch » : « Si vous accouchez donc d’une fille, faites-la mourir en naissant…». Fatalement, la dame accouche d’une fille ! La déesse Isis lui apparaît et lui conseille d’élever sa fille « en garçon » : son mari n’y verra que du feu. Iphis est donc une jeune fille élevée aux yeux de tous comme un garçon… La voici folle amoureuse d’une autre fille… Iante. Et la voici aimée par un jeune homme qui sait qu’elle est une fille. Mais qui ne l’a jamais vue qu’en garçon… Iphis se sait fille, mais qu’importe, cette passion la dévore autant qu’elle la désespère. La jeune Iante étant de famille riche, le père d’Iphis voudrait conclure le mariage. La mère invente toutes sortes d’arguments pour retarder cette échéance, mais rien n’y fait.
À bien y penser, la fable est terrible, mais c’est aussi une comédie romanesque. Les cœurs sont lourds, mais c’est un chef d’œuvre de fantaisie, voire de cocasserie absurde.
On n’est pas au bout de ses surprises dans cette histoire : désirs fous, désespoirs, malentendus comiques, duels, mariage sans précédent, parents responsables mais scandalisés…
Il faudra un sacré tour de magie pour sauver tout ce monde de la catastrophe.
Le texte d’Iphis et Iante, très peu joué, du XVIIème siècle, a été écrit par Isaac de Benserade.
Une petite biographie de l’auteur :
Né en 1612. Mort en 1691.
C’est à 22 ans que Benserade produisit Iphis et Iante, qui eut un assez beau succès lors de sa création durant le carnaval de 1634. Sensé étudier la théologie à la Sorbonne, Benserade était toujours fourré au théâtre de l’Hôtel de Bourgogne, amoureux du théâtre et de la comédienne Bellerose.
Poète précieux et brillant, protégé de Richelieu, puis de tous les puissants après lui, il est passé par le théâtre, brièvement, durant les années 1630, écrivant surtout quelques tragédies. Puis il a mené à Versailles une activité de librettiste/scénariste de ballets, en particulier auprès de Lully, donc en concurrence avec Molière autour de Louis XIV : Les Plaisirs de l’Île enchantée à Versailles, par exemple.
Il a aussi mené une querelle célèbre (à l’époque…) contre un autre poète oublié Voiture, celle des Jobelins contre les Uraniens. Puis il entra à l’Académie Française et, le succès le fuyant, il se retira dans sa maison de Gentilly où il mourut à l’âge de 82 ans.
Qu’en a pensé Marcel ?
Marcel a trouvé plaisant d’entendre un texte en vers qui ne lui a pas paru vieillot du tout. D’ailleurs, beaucoup d’humour s’en dégageait. Le metteur en scène, Jean-Pierre Vincent, a voulu jouer avec le second degré. Cependant, cela aurait mérité d’être plus présent et dès le début. En effet, au départ, on ne sait pas à quoi s’en tenir, si c’est « du lard ou du cochon ».
Les costumes ne sont pas très originaux. Ils mêlent deux époques et deux styles différents : certains sont antiques (un peu comme on imagine Antigone), d’autres modernes (un comédien porte un blouson et un pantalon en cuir). Les décors non plus ne sont pas particulièrement remarquables.
Le dénouement final, surprenant et irréel, est un point positif de la pièce. Cela fait partie des aspects de ce spectacle que Marcel a aimé. Croyant aller voir une tragédie grecque, il s’attendait à une fin tragique durant laquelle certains protagonistes se tueraient de désespoir. Et en fait, pas du tout ! Mais il ne vous en dit pas plus sinon cela casserait l’effet de surprise ! Apparemment, l’auteur avait écrit 2 fins différentes (une positive, une négative). A chaque metteur en scène de choisir la version qu’il veut monter.
Enfin, Marcel a trouvé ce spectacle un peu long. 20-30 minutes en moins auraient été appréciées.
En bref, Marcel a passé un bon moment (quoiqu’un peu long) mais n’a pas trouvé ce spectacle exceptionnel. Il était « sympa mais sans plus« .
Iphis et Iante fait écho au débat actuel sur le mariage pour tous : une fille qui aime une fille et qui veut se marier avec elle malgré les interdits. Même si la différence, non négligeable, tient au fait que sa bien aimée n’est pas au courant de son réel sexe. Étrange qu’une comédie aussi ancienne (elle date du XVIIème siècle tout de même!) anticipe les débats actuels ! Comme quoi, il serait peut-être temps de régler ces questions depuis le temps que ça dure…!
Si vous souhaitez découvrir ce spectacle et vous faire votre propre idée, sachez qu’il est la première création de l’année 2013 des Théâtres et qu’il partira donc en tournée. Le Théâtre Liberté à Toulon l’accueille notamment les 25 et 26 janvier prochains.